L’humanité célèbre chaque 26 juillet, la journée internationale des mangroves. Cette journée est l’occasion de mettre en lumière l’importance des mangroves, écosystèmes uniques situés à la frontière entre la terre et la mer.
Les mangroves sont des forêts évoluant entre la terre et la mer et qui sont composées d’arbres adaptés à vivre en bord de mer où la salinité est élevée et les sols pauvres en oxygène. Ces zones jouent un rôle crucial dans la protection des côtes, la lutte contre le changement climatique et le maintien de la biodiversité.
Rencontré ce mercredi 30 juillet à son bureau à Conakry, l’océanographe de formation et environnementaliste de profession, Pr Kandet Bangoura, pense que la mangrove est un écosystème très important pour l’environnement et pour la planète. « Dans ce sens que la mangrove ne se retrouve pas partout. C’est un écosystème qui se retrouve dans les milieux tropicaux. En Afrique c’est à partir de la Mauritanie jusqu’en Angola. Quand vous partez dans les pays tempérés, vous ne les retrouvez pas », explique t-il.
Cet environnementaliste déplore les menaces qui pèsent de nos jours sur les mangroves. Parmi lesquelles : l’urbanisation, l’expansion des infrastructures industrielles dans des zones côtières ainsi que l’agriculture intensive.
« Sur le plan environnemental, la mangrove est un écosystème qui séquestre fortement le dioxyde de carbone (CO2), pour pouvoir réguler le climat sur la terre, notamment dans la zone où il y’a d’abord cet écosystème, mais aussi les climats d’autres pays côtiers ou continentaux. Et la principale menace dans le monde actuel, est le déboisement. Aussi, la transformation de ces aires ou de ces superficies, sur le plan de l’agriculture ou de l’installation des fermes crevetticoles ou piscicoles ».
La mangrove impactée en Guinée
« Si on met un accent sur la Guinée, on peut dire que cet écosystème subit. Il est transformé pour avoir des superficies rizicultuvables, en premier lieu. Ensuite, des superficies pour pouvoir installer des infrastructures qui déboisent très rapidement cet écosystème. Donc, en voulant transformer ces superficies en zones d’habitation ou en zones d’industrie ou d’installation des ports, nous attaquons la superficie très fortement. Toute chose qui joue sur la séquestration de ce carbone, mais aussi pour les lieux de reproduction des animaux, des produits halieutiques que nous consommons en grande quantité avec la population ».
La destruction de la mangrove a un impact négatif sur la biodiversité. Selon le Pr Kandet Bangoura, l’écosystème des mangroves est considéré comme un lieu de reproduction, de nidification et de l’élevage des animaux aquatiques ou des animaux halieutiques.
« Les poissons qui viennent se reproduire, se protéger sous ces mangroves, se reproduisent jusqu’à un certain stade. Après, ils migrent encore vers l’océan, le large, pour pouvoir se développer. Donc, en détruisant ces zones que nous, les scientifiques ou les hydrobiologistes, appelons les frayères, nous détruisons l’habitat de ces produits halieutiques dont nous avons tellement besoin pour nos populations », explique t-il en affirmant que dans les années 60 en Guinée, la couverture de la mangrove allait jusqu’à 350 à 400 000 hectares. Et avec le développement du pays, l’agriculture, la pêche, l’élevage et les industries, cette superficie est actuellement réduite.
« Selon les dernières études que j’ai eues à effectuer avec l’assistance du PNUD et d’autres organisations ONG en 2021, cette superficie est actuellement entre 180 et 200 000 hectares. Alors, une réduction drastique depuis deux ou trois décennies chez nous. C’est important de le notifier, puisque si vous avez des idées sur l’implantation des ports, ces ports comme sur le Rio-Nunez, l’île cap verga ou bien sur le fleuve Fatala à Boffa, ou encore dans l’estuaire du Konkouré, pourquoi pas au sud de Conakry. Tous ces grands ports que vous connaissez, sont implantés dans la mangrove…Par le passé, quelques-unes de ces superficies, étaient utilisées uniquement pour l’agriculture ou bien la saliculture »
Autre pratique citée par l’océanographe Kandet Bangoura qui impacte les mangroves particulièrement celles de la Guinée, est l’exploitation minière.
« L’ exploitation minière joue également sur la mangrove surtout le prélèvement du sable et du gravier. Maintenant, on parle aussi des blocs qui sont prélevés dans ces mangroves et ça fragilise l’écosystème », rappelle-t-il.
Face à ces menaces, Pr Kandet Bangoura alerte et propose une solution aux autorités guinéennes afin de protéger les mangroves
« Il faut sensibiliser et éduquer pour protéger les mangroves. Parce que, quand on n’est pas sensibilisé et éduqué, ce sont des problématiques. Donc cette sensibilisation et éducation des communautés peuvent être un atout très important pour la préservation de cet écosystème qui nous fournit de l’oxygène et qui nous débarrasse de gaz carbonique en séquestrant le carbone ».
Pour rappel, la République de Guinée a signé le 6 novembre 2024 en Chine, l’accord d’établissement du centre international de la mangrove. Le 21 juillet 2025, le Chef de l’Etat le Général Mamadi Doumbouya a promulgué à travers un décret rendu public sur les ondes des médias d’Etat, la loi ordinaire L-2025-015-CNT, adoptée le 27 mai 2025 par le Conseil national de la Transition (CNT). Une loi qui autorise la ratification de cet accord d’établissement du centre international de la mangrove.
Moussa Konaté pour Kankan24.com/Batè FM