À Kouroussa, un groupe de jeunes en colère contre la société aurifère Kouroussa Gold Mining a érigé les barricades au niveau du principal point d’entrée de ladite société dans la nuit du lundi à ce mardi 1er juillet. Ces jeunes dénoncent ce qu’ils qualifient de licenciement par la KGM de deux de ses employés qui sont issus de la communauté. Selon eux, ces jeunes sont victimes de licenciement « injuste et selectif ». La société réfute cette thèse et les autorités administratives tentent la médiation. L’accès à la société est resté bloqué durant plusieurs heures. Notre rédaction a tenté en savoir davantage.
Ce lundi 30 juin 2025, pendant que l’obscurité de la nuit couvrait la ville de Kouroussa, une dizaine de jeunes érigeaient les barricades sur l’artère non bitumée qui mène à la société Kouroussa Gold Mining (KGM) située dans la commune. Ces jeunes se réclamant les autochtones de la préfecture de Kouroussa au nord-est de la Guinée à 87 km de Kankan, dénoncent le licenciement des travailleurs de la KGM issus de la localité. Sur le lieu, aucune violence n’est signalée. Mais les manifestants ne décolèrent pas. L’accès à la société reste barricadé jusque dans la matinée de ce mardi 1er juillet. Des blocs de pierre alignés à l’entrée de la société sont soutenus par les branches d’arbres au milieu desquels on aperçoit des plaques empêchant ainsi le personnel d’y accéder. Interrogé par notre confrère Mohamed Camara basé dans la ville, le porte-parole des manifestants explique : « Nous sommes dans la rue aujourd’hui, parce que cette société crée de graves difficultés à notre communauté. Les jeunes de Kouroussa employés par KGM ne cessent d’être licenciés. Chaque jour, nous apprenons que le nombre de nos frères diminue au sein de l’entreprise. Hier encore, nous avons appris que deux de nos amis avaient été renvoyés. À chaque fois, ce sont nos frères qui sont licenciés, tandis que les étrangers sont épargnés. Si cela continue ainsi, aucun jeune de Kouroussa ne restera dans cette société. Nous allons la voir passer entièrement entre les mains des étrangers », dénonce Doubany Condé, porte-parole du mouvement de protestation qui accuse la société Kouroussa Gold Mining de licenciement visé et sélectif. « Ceux ne sont que les jeunes originaires de Kouroussa qui sont victimes de licenciement dans cette société », ajoute-t-il.
Visiblement remonté, M.CONDE laisse entendre que : « La société nous cause beaucoup de problèmes, mais nous nous taisons parce que nos frères y travaillent. Si nous ne réagissons pas maintenant, nous risquons de la perdre définitivement. Nous ne sommes pas sortis pour défendre un individu, mais c’est pour la cause de toute la communauté. Si le nombre de nos frères n’augmente pas dans l’entreprise, il ne faut pas qu’il diminue au moins », déclare Doubany Condé.
La société réfute et dénonce une manipulation
Joint au téléphone ce mardi par la rédaction de Kankan24.com, l’un des responsables de la société ayant requis l’anonymat confirme le licenciement de deux travailleurs, mais réfute les propos des manifestants. « Il s’agit d’un superviseur et d’un officier relation communautaire », révèle notre source contactée au sein de la société.
En ce qui concerne les raisons, ce responsable de la KGM précise que l’acte est justifié et a suivi toutes les étapes administratives relatives à un licenciement. « Ils sont licenciés pour corruption. La notification est faite hier lundi. Nous avons respecté toutes les conditions. Les deux travailleurs ont été informés de la décision. Ce n’est pas toute la jeunesse de Kouroussa qui manifeste, mais plutôt quelques jeunes », se défend ce cadre de la société Kouroussa Gold Mining.

Que disent les travailleurs licenciés ?
Interrogé également par notre rédaction, l’un des employés licencié de la société Kouroussa Gold Mining dément catégoriquement cette thèse de corruption glanée comme la raison principale de leur licenciement. « C’est faux. Ce n’est pas lié à la corruption. Je ne peux rien vous dire de plus. Tout ce que je peux vous dire, c’est qu’une procédure est lancée du côté de la société, au niveau des autorités et de la justice. Les responsables syndicaux me disent de ne pas trop communiquer dessus jusqu’à la fin de la procédure », a laissé entendre Ibrahima Diawara jusque-là superviseur communautaire au sein de cette société aurifère basée dans la commune urbaine de Kouroussa.
La version de l’autorité préfectorale
Selon le Préfet de Kouroussa, cette affaire date de deux mois. Mais il confirme tout de même que c’est hier que la notification de licenciement a été faite. « J’avais entretenu les jeunes il y a quelques jours autour de cette affaire. Il y a même des femmes qui ont voulu manifester, mais je leur ai dit qu’aucune décision n’était encore prise par la société concernant leur licenciement. C’est hier aux environs de 23 heures, qu’un groupe de jeunes est venu me demander si je suis au courant du licenciement de ces deux travailleurs. Je leur ai dit que je ne suis pas informé. J’ai appelé l’inspection préfectorale du travail qui m’a dit qu’elle n’est pas aussi informée de la situation. Quelques minutes après leur départ de ma résidence, on m’a appelé que l’accès à la société KGM est barricadé », explique le Colonel Idrissa Camara l’actuel Préfet de Kouroussa.
« Selon les informations que j’ai reçues, il parait que ces deux travailleurs licenciés collaboreraient avec un autre jeune qui ne travaille pas à la société dans le cadre de la location de voiture. Comme le véhicule est tombé en panne, ces employés remerciés ont dit au jeune de réparer au risque de le voir rejeté par la société. C’est le même jeune propriétaire du véhicule qui est parti porter plainte contre eux pour arnaque, sous prétexte qu’ils travaillent ensemble depuis deux ans. Que chaque mois, il leur donne de l’argent », a affirmé le Préfet de Kouroussa avant de revenir sur ses démarches auprès des responsables de la société. « J’ai été interpellé sur le sujet et j’ai appelé maintes fois la société. Je leur ai dit, si c’est le cas, la police et la gendarmerie sont là. En-dehors de cela, il y a une inspection préfectorale du travail qui est à Kouroussa. Mettez-vous en rapport avec celle-là avant toute décision pour voir s’ils ont tort ou pas ».
Avant la manifestation, les protestataires confirment avoir rencontré le Préfet de Kouroussa pour lui faire part de leurs préoccupations. Aux dernières nouvelles, le barrage est levé, la manifestation suspendue.
Mais ils préviennent tout de même de reprendre la manifestation, si leur revendication n’est pas prise en compte. Ce mercredi 2 juillet, une rencontre est prévue à la préfecture pour discuter autour de ce sujet. Nous y reviendrons.
Mamadi Kèndè Mara
Mohamed Slem Camara